Attention, cet article revient en détail sur une affaire de féminicides, et certains détails peuvent être difficiles à lire.
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Si elle n’a pas toujours été à la hauteur, la saison 3 de Narcos: Mexico s’est distinguée en fictionnalisant une sordide affaire, portée par le personnage de Victor Tapia dans la série, un policier qui enquête sur les disparitions et meurtres de femmes à Ciudad Juárez. Cette histoire, bien que méconnue, est toujours d’actualité.
Outre la guerre des cartels, Ciudad Juárez, ville frontalière avec les États-Unis, au nord du Mexique, est depuis 1993 en proie à plusieurs disparitions et meurtres de femmes, dont beaucoup non élucidés. En effet, cette succession de meurtres n’est pas le fait d’un seul homme mais de plusieurs, comme le dépeint Narcos: Mexico. Depuis 1993 et jusqu’en 2008, plus de 1 653 cadavres ont été trouvés et 2 000 femmes sont toujours portées disparues. Parmi les corps retrouvés dans le désert, on retrouve des traces de mutilations, de viols et d’étranglements. Depuis, Ciudad Juárez s’est vue attribué un surnom terrible, “la ville qui tue les femmes”.
C’est seulement en 2015, après l’arrestation de cinq hommes pour les meurtres de onze femmes, que les disparitions ont commencé à diminuer, mais le mystère reste toujours irrésolu.
Victor Tapia (Luis Gerardo Méndez) dans la saison 3 de <em>Narcos: Mexico</em>. (©Netflix)
Dans cette histoire, les autorités et le gouvernement n’ont pas vraiment réagi efficacement. La surveillance policière est presque inexistante dans ce coin du Mexique, à tel point qu’être une femme y est dangereux. Que ce soit dans la nuit ou en pleine journée, des femmes ont disparu sans que des enquêtes ne soient menées ou que la police ne réagisse. Comment expliquer cette indifférence ? Certains supposent que c’est la peur qui prime face à un potentiel réseau criminel toujours actif, quand d’autres évoquent une incompétence certaine des forces de l’ordre.
Ce sont les mères de ces jeunes femmes et des collectifs féministes qui se sont organisés pour médiatiser l’affaire, et qui continuent aujourd’hui de tenter d’obtenir justice au nom de toutes ces femmes disparues et tuées dans l’indifférence générale. En 2007, une sentence de la Cour interaméricaine des droits de l’Homme décide enfin de pointer l’irresponsabilité des autorités mexicaines dans la perpétuation de ces féminicides.
C’est seulement en 2012 que l’État du Chihuahua voit émerger un Centre de justice pour les femmes qui permettrait d’enquêter sur ces meurtres, et d’offrir une assistance aux familles des victimes. Un film a été consacré à cette histoire, avec Jennifer Lopez dans le rôle principal, Les Oubliées de Juarez, réalisé par Gregory Nava en 2007.