Usé par les scandales, affaibli par une série de démissions sans précédent, le Premier ministre britannique Boris Johnson s’est finalement résolu jeudi à quitter le pouvoir, en annonçant sa démission en tant que chef du Parti conservateur.
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“C’est clairement la volonté du Parti conservateur qu’il y ait un nouveau leader et donc un nouveau Premier ministre”, a-t-il déclaré lors d’une allocution de six minutes devant Downing Street, se disant “triste” de quitter “le meilleur travail au monde”.
Le calendrier pour l’élection d’un nouveau leader conservateur sera précisé la semaine prochaine, a ajouté Boris Johnson.
Reconnaissant son échec, il a néanmoins jugé “dingue” que son gouvernement ait voulu se débarrasser de lui.
Après trois années turbulentes au pouvoir, marquées par le Brexit dont il était le champion, la pandémie de coronavirus, l’invasion russe en Ukraine et une inflation record, Boris Johnson a assuré que celui ou celle qui lui succéderait aurait “tout (son) soutien”.
La présidence ukrainienne a remercié Boris Johnson, en première ligne dans le soutien occidental envers Kyiv, pour son soutien “dans les moments les plus difficiles”.
Depuis Bali, la ministre britannique des Affaires étrangères Liz Truss, possible candidate à la succession, a appelé au “calme et à l’unité”, estimant que Boris Johnson avait “pris la bonne décision”.
Un sondage YouGov auprès des membres du Parti conservateur donne le ministre de la Défense Ben Wallace favori pour succéder à M. Johnson.
“Nous n’avons pas besoin d’un changement à la tête des Tories. Nous avons besoin d’un vrai changement de gouvernement”, avait peu avant fait valoir le chef de l’opposition Keir Starmer, menaçant d’organiser un vote de défiance à la Chambre des communes si M. Johnson restait au pouvoir.
“Il était temps !”
D’une popularité jadis inoxydable, Boris Johnson avait sombré dans les enquêtes d’opinion : selon deux sondages cette semaine, près de 70 % des Britanniques souhaitaient son départ.
Le mois dernier, il avait échappé à un vote de défiance, 40 % des députés conservateurs refusant cependant de lui accorder leur confiance.
“Il était temps ! Sérieusement, avait-on déjà vu quelqu’un de si arrogant, ignorant, délirant”, a estimé Helen Dewdney, 53 ans, une employée interrogée par l’AFP à Londres.
“Voilà ce qui se passe quand vous avez un Premier ministre qui n’a aucun scrupule”, a réagi Cletus Morraies, 51 ans, employé dans un cabinet d’avocats. “Mensonges après mensonges […] pour moi, il a trahi le pays.”
Les démissions et les appels au départ de M. Johnson s’étaient poursuivis jusqu’à son annonce jeudi, alors que Downing Street annonçait une série de nominations pour remplacer les ministres et secrétaires d’État démissionnaires.
Le tout nouveau ministre des Finances, Nadhim Zahawi, nommé mardi, avait appelé Boris Johnson à “partir maintenant”, alors que la ministre de l’Éducation, Michelle Donelan, nommée elle aussi mardi, annonçait sa démission, estimant qu’elle n’avait “pas d’autre choix”.
Au total, une soixantaine de départs ont été annoncés au sein du gouvernement depuis mardi, dont cinq ministres, un exode d’une rapidité sans précédent dans l’histoire politique britannique.
Mercredi soir encore, plusieurs ministres s’étaient rendus à Downing Street pour essayer, en vain, de convaincre Boris Johnson qu’ayant perdu la confiance du Parti conservateur, il devait démissionner, dans son intérêt et celui du pays.
Un “mandat colossal” à accomplir
Tout au long de la journée, le Premier ministre de 58 ans s’était accroché, en affirmant qu’il avait un “mandat colossal” à accomplir, avant de riposter en limogeant par téléphone mercredi soir le ministre Michael Gove, chargé du rééquilibrage territorial, qui avait été le premier à venir lui conseiller de démissionner plus tôt dans la journée.
Le mécontentement couvait depuis des mois, nourri notamment par le scandale des fêtes illégales à Downing Street pendant le confinement anti-Covid-19, alors que les Britanniques devaient respecter des règles très strictes.
Boris Johnson, connu pour ne pas être à un mensonge près, avait varié dans ses explications, provoquant frustration puis colère des élus conservateurs, dans un pays confronté à une inflation record de 9 % et à des mouvements sociaux.
La démission mardi soir du ministre des Finances, Rishi Sunak, et du ministre de la Santé, Sajid Javid, avait sonné l’hallali pour le Premier ministre, après un nouveau scandale sexuel impliquant le “whip” adjoint, chargé de la discipline des députés conservateurs, que M. Johnson avait nommé en février, “oubliant” des accusations passées de même type.
Konbini news avec AFP